Une Croissance Exponentielle et ses Conséquences
L’essor fulgurant des trottinettes électriques dans nos villes a bouleversé la mobilité urbaine, mais il a aussi mis en lumière les lacunes de notre Code de la route. En quelques années, ces engins sont devenus omniprésents, mêlant piétons, cyclistes et automobilistes dans une coexistence parfois chaotique. Face à cette nouvelle réalité, la question se pose : notre Code de la route est-il encore adapté ou doit-il évoluer pour intégrer ces nouveaux venus ?
En 2023, la France comptait plus de 2,5 millions d’utilisateurs réguliers de trottinettes électriques, un chiffre qui a triplé depuis 2020. Rien qu’à Paris, on enregistre plus de 40 000 trottinettes en libre-service, sans compter les modèles personnels. Cette popularité s’accompagne malheureusement d’une hausse des incidents : la Sécurité routière a recensé 6800 accidents impliquant des trottinettes électriques en 2023, dont 22 mortels. Ces chiffres ont augmenté de 30 % par rapport à 2022, soulignant l’urgence de mettre à jour la législation.
Un Cadre Réglementaire à Compléter
Le Code de la route français, dans sa forme actuelle, est largement dépassé par cette nouvelle réalité. Bien que des ajustements aient été faits en 2019 avec la loi d’orientation des mobilités, ces mesures restent insuffisantes. Par exemple, la loi impose une vitesse maximale de 25 km/h pour les trottinettes électriques et interdit leur usage sur les trottoirs, sauf autorisation spécifique. Cependant, ces règles sont souvent ignorées ou méconnues des usagers.
La ville de Paris a tenté de renforcer les régulations en instaurant une limitation à 20 km/h dans la plupart des zones et à 8 km/h dans certaines zones piétonnes. De plus, le stationnement anarchique des trottinettes est désormais sanctionné, avec des amendes allant jusqu’à 135 euros pour les véhicules mal garés. Mais ces mesures locales, bien que nécessaires, ne suffisent pas à résoudre les problèmes de cohabitation entre les différents usagers de la route.
Des Défis Multiples à Relever
L’une des principales difficultés réside dans l’application des règles. Les forces de l’ordre, déjà sous pression, peinent à contrôler efficacement le respect des limitations de vitesse et les comportements dangereux. De plus, la nature même des trottinettes électriques, petites et souvent anonymes, rend difficile l’identification des contrevenants.
Un autre enjeu majeur concerne la protection des usagers vulnérables. En 2023, plus de 35 % des accidents impliquant des trottinettes ont également concerné des piétons, souvent blessés par des conducteurs imprudents ou inattentifs. Dans ce contexte, les associations de piétons appellent à une révision complète du Code de la route pour mieux protéger ces usagers.
Les Propositions pour un Nouveau Code de la Route
Face à ces défis, plusieurs pistes sont envisagées pour moderniser le Code de la route :
- Introduction d’un permis ou d’une formation obligatoire pour les conducteurs de trottinettes, similaire à ce qui existe pour les cyclomoteurs. Cela pourrait sensibiliser les usagers aux dangers et aux règles spécifiques à respecter.
- Mise en place de dispositifs technologiques de limitation automatique de la vitesse, déjà testés par certaines villes, pour réduire les comportements dangereux.
- Création de pistes cyclables séparées et multiplication des zones piétonnes où les trottinettes seraient interdites, pour améliorer la sécurité de tous les usagers.
Un Choix de Société
Finalement, la question d’un nouveau Code de la route pour les trottinettes électriques soulève des enjeux plus larges : quelle place voulons-nous donner à ces nouveaux moyens de transport dans nos villes ? Si leur succès montre un désir fort de mobilité flexible et verte, leur intégration harmonieuse dans l’espace public dépendra de la capacité des pouvoirs publics à anticiper et à réguler cette révolution urbaine.
Une mise à jour du Code de la route, adaptée aux spécificités des trottinettes électriques, s’impose comme une nécessité pour garantir une cohabitation sereine entre tous les usagers. Sans cela, nous risquons de voir les incidents continuer à augmenter, au détriment de la sécurité et de la qualité de vie en milieu urbain.